Mesures d’arrestation administrative à Namur : une politique sociale qui souffle le chaud et le froid
27/02/2018 10:00
A Namur, l’accès des sdf à l’abri de nuit est resté longtemps limité - en nombre de nuitées - par un système « inique » de quota calculé individuellement par personne … système de quota supprimé (enfin) depuis peu. Ensuite, on interdit la mendicité dans le centre-ville en jetant un voile sur la pauvreté. Et enfin, on procède à l’arrestation administrative des sdf dits récalcitrants et réfractaires. Les personnes précarisées sont-elles bien au cœur de la politique sociale de notre Capitale wallonne ?
La nouvelle mesure namuroise répressive et contraignante à l’égard des « sdf récalcitrants » et des « sdf réfractaires », pour reprendre les termes de la communication de la ville de Namur, a de quoi interpeller. Les sdf meurent autant en été qu’en hiver.
Le rapport de force est-il le bon levier pour aider les personnes sans abri à trouver un refuge ? On se trompe de méthode et de priorité et on trompe le citoyen en donnant l’illusion qu’une ordonnance du bourgmestre de Namur contraignant les SDF à recevoir une aide sociale est la solution. C’est la politique du logement et de lutte contre la précarité qui devaient être la priorité.
In fine, qui est à l’abri par cette ordonnance de police ? Le Bourgmestre ou les personnes sans abri ?
Bien sûr, personne ne souhaite être tenu pour responsable d’un décès ou poursuivi pour non-assistance à personne en danger. Évidemment, voir quelqu'un « crever » de froid et de faim est insupportable et indigne, nous l’avons assez répété. Évidemment, on se réjouit que les personnes sans abri soient hébergées alors que les températures plongent. Et après ?
Quand les températures seront jugées arbitrairement plus clémentes et que l’alerte sera passée, va-t-on enfin aborder les questions essentielles de fond sur le droit fondamental au logement ? Les nécessaires réflexions seront-elles élargies aux causes - et non aux conséquences - de la précarité et des raisons qui mènent de plus en plus de gens à la rue ? Quel paradoxe entre, d’un côté, l’interdiction d’accès à l’abri de nuit par l’application d’un système de quotas et, de l’autre côté, l’obligation par la contrainte d’hébergement à l'abri de nuit ?
Il n’y a pas de réponse simple à une question compliquée, il faudra faire preuve de davantage de courage politique pour mettre en place des solutions structurelles durables, y compris de prévention, face à cette pauvreté qui pousse tant de gens dehors et à terre :
- En termes de logement, le groupe PS demande d’entamer une réflexion à propos des bâtiments vides d’où sont chassés ceux qui osent les utiliser, ne serait-ce que pour quelques moments de répit. Faire la place à d'autres mesures qui ont fait leurs preuves et se sont révélées être plus qu’une bouée dans la reconstruction de soi, le housing first. Encourager la mixité sociale en rendant obligatoire les charges d’urbanisme imposant davantage de logements accessibles ...
- Il faudra également se poser la question de la coordination de ce plan hivernal et de son articulation. Quel est le rôle du relais social, des travailleurs sociaux et également de la Police dans ce dispositif ? A-t-on seulement recueilli leur avis ? Comme de tradition à Namur, la concertation n’a pas eu lieu. Le relais social n’a pas été concerté, alors que c’est précisément sa mission essentielle ! Comment les travailleurs sociaux peuvent-il accueillir une mesure arbitraire, non concertée et dévalorisante pour le difficile travail qu’ils réalisent tout au long de l’année. Où sont les synergies, y compris entre la ville et le CPAS ?
- Et surtout prendre en compte la question du financement de ces (trop peu) nombreuses associations qui tentent de survivre, comme leurs bénéficiaires d’ailleurs, pour traiter au quotidien toujours plus de problèmes cruciaux.
- Et qu’en est-il également des libertés individuelles ? Le délit de mendier a été supprimé dans notre pays et c’est heureux. Des règlements réapparaissent toutefois, notamment à Namur. Être pauvre et à la rue ce n'est pourtant pas un crime ! Malheureusement, la tendance est plus à combattre les pauvres que s’attaquer aux causes de la pauvreté. A nouveau, la réponse apportée aux personnes en souffrance et sans abri dans la rue est brutale et très éloignée de la volonté de dialogue affichée voici 6 mois suite aux événements de la place d’Armes. L’ordonnance décrétée par le Bourgmestre n’apporte pas de réponse structurelle au sans-abrisme : les personnes seront de gré ou de force arrêtées.
Il est grand temps d’agir ! Nous sommes quant à nous prêts mais pas dans ce sens ...
Le PS namurois demande à nouveau l’ouverture d’une vraie réflexion de fond sur la question de la pauvreté à Namur, en réelle concertation et pleine cohérence avec les opérateurs structurels qui œuvrent pour l’action sociale namuroise, que ce soit à ville, au CPAS ou au relais social, ainsi qu’avec les associations de première ligne.